Marie des grèves ....

LE CHE vit ......

 

L’Humanité vient d’éditer un hors-série entièrement consacré à Ernesto Che Guevara dont je vous recommande vivement la lecture. Un dossier qui nous change quelque peu de la propagande radiotélévisée qui fait la part belle aux anticastristes.

Au sujet de ce numéro exceptionnel  de l’Huma,  j’ai lu divers commentaires nous assurant qu’il convenait de n’y voir qu’une tentative de « récupération » d’un PCF aux abois depuis les résultats calamiteux de mai dernier.

C’est la raison pour laquelle, quarante ans après l’assassinat du CHE, j’ai choisi un article paru à l’occasion du trentième anniversaire de sa mort…

« Le Che » Un dossier de 12 pages dans « l’Humanité » du jeudi 9 octobre 1997

Il y a trente ans, Ernesto Guevara, dit « le Che », était assassiné en Bolivie.

« En quelle sorte de vivant ce mort s’est-il transformé ? ». Récits, entretiens, témoignages, analyses, de Régis Debray, de Jeannette Habel, du sous-commandant Marcos, d’anciens compagnons du héros, et de jeunes d’aujourd’hui.

« Le Che, l’éthique en politique »

LE 9 octobre 1967, la nouvelle se répand comme une traînée de poudre : le Che est tombé. Pour notre génération, c’est un symbole de justice, de solidarité, de pureté, qu’on vient d’abattre. Trente ans après, on s’arrache les T-shirts à l’effigie d’un combattant mythique qu’on n’a, dans la plupart des cas, jamais connu vivant. Le courant est si fort que « Newsweek » titre en une : « Le Che vit ». Et dire que, naguère, de beaux esprits avaient annoncé la « fin de l’Histoire… » Aujourd’hui, alors que s’annoncent partout des commémorations parfois impressionnantes, le constat s’impose à tous : il y a un « effet Che Guevara ».

Comment expliquer cette pérennité de l’hommage à une figure apparemment si peu dans « l’air du temps » ? Sinon par le fait que des valeurs fortes sont plus profondément ancrées qu’on veut bien le penser et qu’elles ne demandent, dans un contexte nouveau, qu’à se manifester ? Le Che, c’est l’authenticité, la proximité du peuple, la sincérité, l’éthique en politique, la radicalité. C’est la contestation des pouvoirs autoritaires et bureaucratiques de toute nature, le refus des privilèges et des prébendes quels qu’en soient les bénéficiaires. C’est la résistance aux puissants, la volonté de changer la vie et de changer le monde. « Ce qui a fait que j’ai lutté toute ma vie pour la justice, pour la dignité, pour l’égalité ? », interrogeait-il. « J’étais en contact étroit avec la pauvreté, la faim, la maladie, j’ai vu la dégradation due à la malnutrition et la répression. »

Ces réalités, il les a vécues dans chaque pays du continent sud-américain : Pérou, Chili, Venezuela, Bolivie, Colombie, Guatemala - où il resta en vue de participer à la réforme agraire. Après le renversement du président du Guatemala, Jacobo Arbenz, le Che partit pour le Mexique où il connut Fidel Castro, exilé lui aussi. Ils travaillèrent ensemble et le Che décida de partir avec les Cubains dans le bateau « Granma ». Ils débarquèrent sur les côtes orientales de Cuba. On connaît la suite. Trente ans plus tard, une nouvelle réalité latino-américaine a émergé. Des dictatures ont été vaincues. Des démocraties tentent de se frayer un chemin. Ces changements ont emprunté des voies diverses. Chacun de vous a, à l’esprit, quelques-unes de ces expériences faites de souffrances et d’espoir : le Chili, l’Uruguay, le Paraguay, l’Argentine, Haïti, le Salvador, le Guatemala.

Dans un monde transformé, mais toujours impitoyable, l’intervention du mouvement social a changé de forme mais demeure décisive pour ouvrir les perspectives de justice et de dignité auxquelles aspirent les peuples de la région.

Le Che n’avait pas de modèle. Inversement, ce serait le trahir que de faire de son expérience singulière une référence figée. Fidèles à ses idéaux, les combattants zapatistes, par exemple, qui partagent cette même soif de justice et de dignité, cherchent cependant leur propre voie, qui n’est pas celle de la prise de pouvoir par les armes. De même, le magnifique Mouvement des sans-terre - mouvement social par excellence, avec, aux côtés des paysans, des ouvriers, des économistes, des avocats, des artistes, des religieux - se reconnaît dans les valeurs du Che sans suivre le même chemin. Plus généralement, les mobilisations populaires qui, du Mexique au Salvador et à l’immense Brésil ont, par la voie des urnes, permis aux forces de progrès de conquérir des positions face au pouvoir néolibéral en place, continuent, elles aussi, dans les conditions d’aujourd’hui, ce qu’il y a de durable dans le message du Che.

Et quelle illustration plus émouvante de l’actualité des valeurs qu’incarne l’illustre combattant, que la dignité rebelle du peuple de Cuba, tenant en échec l’arrogante superpuissance ! En définitive, le secret du Che n’est-il pas d’avoir su incarner cette « utopie de la vie, nouvelle et irrésistible » dont Gabriel Garcia Marquez appelait la création de ses vœux : une utopie, précisait-il « où l’amour sera vraiment une certitude de bonheur possible et où les lignées condamnées à cent ans de solitude auront enfin et pour toujours une seconde chance sur la Terre ».

Intervention de Francis Wurtz à la soirée en hommage au Che, Paris-Sorbonne, 26 septembre 1997.



10/10/2007
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